Thème 1 : Quel équilibre entre recours à la sobriété énergétique et recours aux technologies nouvelles ?

Le scénario de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC2) intégrait plusieurs hypothèses concernant les leviers comportementaux et techniques. La question de l’équilibre entre le recours à la sobriété énergétique et le recours aux technologies nouvelles à moyen et long termes se pose à nouveau dans le cadre de la nouvelle Stratégie française sur l'énergie et le climat.

Cheminées d'usines (crédit : Laurent Mignaux / Terra)

Les scénarios de transition écologique décrivent des transformations très importantes des différents secteurs de l’économie, qui reposent schématiquement sur deux types de leviers :

  • Des leviers techniques, qui traduisent la diffusion des techniques et technologies. Par exemple, le développement de la production d’électricité renouvelable, de la motorisation électrique des véhicules ou la rénovation massive des bâtiments. Ces leviers n’impactent pas de façon forte les usagers finaux, et on peut considérer qu’ils se font à niveau de service égal.
  • Des leviers comportementaux, qui traduisent des évolutions des modes de vie individuels et collectifs. Par exemple, l’évolution des modes alimentaires, le niveau de consommation des ménages, le recours aux mobilités douces, la limitation de la vitesse sur autoroute, le renoncement à certains déplacements ou à effectuer certaines activités, etc. Ces leviers induisent un impact sur le niveau de service, voire de confort, pour les usagers. On utilise parfois le terme de « sobriété » pour les qualifier.

A noter que dans la réalité, il n’y a pas une séparation aussi nette. Tout changement technique suppose une acceptation et une appropriation par les citoyens (par exemple, l’utilisation des technologies de capture et stockage de CO2 suppose que les riverains acceptent de vivre près de sites d’enfouissements géologique de CO2), et tout changement comportemental requiert un environnement, y compris technique le favorisant (par exemple, il faut mettre en place des pistes cyclables pour inciter à la pratique du vélo).

Cycliste urbain à Courbevoie (crédit : Sylvain Giguet / Terra)

Historiquement, les scénarios de transition écologique ont eu tendance à considérer essentiellement les leviers techniques, probablement du fait qu’ils sont plus directs à modéliser et qu’ils soulèvent moins de difficulté sur l’acceptabilité sociétale et les politiques publiques correspondantes. Ces leviers techniques peuvent représenter une généralisation de technologies aujourd’hui connues mais plus ou moins développées (en supposant généralement une amélioration de leur efficacité et la baisse des coûts associés), voire la diffusion de technologies aujourd’hui non matures (on peut alors parler de rupture technologique). Néanmoins, l’objectif de neutralité carbone a conduit à revoir le niveau d’ambition des trajectoires à la hausse, et les leviers comportementaux ont alors pris une place plus importante.

Ainsi, le scénario de la SNBC 2 intégrait plusieurs hypothèses concernant les leviers comportementaux :

  • Évolution (poursuivant une tendance observée) des régimes alimentaires vers des régimes moins carnés, avec plus de fruits et légumes frais ainsi que de protéagineux (lentilles, fèves, haricots blancs, pois, etc.) ;
  • Baisse de 1°C de la température moyenne de chauffage des logements ;
  • Plus de constructions de logements neufs dans le résidentiel collectif traduisant un objectif de redynamisation des centres urbains et de limitation de l’artificialisation des sols ;
  • Développement de l’économie circulaire (moins de produits neufs, choix de produits de meilleure qualité et réparabilité) ;
  • Développement du télétravail, du covoiturage, des mobilités douces, stabilisation du trafic aérien longue distance.

Ce scénario de la SNBC 2 adoptait par ailleurs une approche relativement « prudente », en ne reposant pas sur des ruptures technologiques fortes (comme par exemple la capture directe du CO2 dans l’atmosphère), mais en recourant tout de même à certaines technologies nouvelles ou aujourd’hui peu utilisées (capture et stockage technologique du carbone sur les sites d’émission industriels, procédés industriels innovants, production d’hydrogène décarboné, etc.). Par ailleurs, ce scénario activait plusieurs leviers consistant à généraliser certaines techniques ou technologies : électrification totale du parc de véhicules particuliers, production d’électricité totalement décarbonée, rénovation de l’ensemble du parc de bâtiments, etc.

Borne de recharge de véhicule électrique (crédit : Arnaud Bouissou / Terra)

Dans le cadre de la nouvelle Stratégie française sur l’énergie et le climat, la question se pose donc à nouveau quant à l’équilibre entre le recours à la sobriété énergétique et aux nouvelles technologies (à plus ou moins long terme).

Un fort recours aux nouvelles technologies peut permettre de préserver davantage les modes de vie actuelle. Il peut toutefois soulever un certain nombre de risques quant :

  • Aux coûts économiques ;
  • À l’impact sur les ressources naturelles (par exemple, disponibilité des métaux rares) ;
  • A la consommation d’énergie supplémentaire que certaines technologies entrainent (par exemple la production d’hydrogène décarboné, en notant que d’autres peuvent permettre des économies d’énergie comme l’électrification par batteries des véhicules) ;
  • A la disponibilité des technologies concernées (par exemple, le fait de disposer de motorisations alternatives à moyen terme pour l’aviation) ;
  • Etc.

A l’inverse, un fort recours aux leviers comportementaux peut permettre d’atteindre les objectifs climatiques en mobilisant moins de transformations techniques. En 2019, dans son rapport spécial sur le réchauffement climatique de 1,5°C, le GIEC notait ainsi que les trajectoires, pour lesquelles la consommation d’énergie et de matière est faible et pour lesquels les changements de comportements sont les plus marqués, sont celles qui présentent le plus de synergies avec l’atteinte des objectifs de développement durable (éradication de la faim, de la pauvreté, préservation des écosystèmes, etc.) Mais cela soulève la question de l’acceptabilité sociale de telles évolutions, des potentielles pertes de confort associées, et des politiques publiques pouvant être déployées pour produire ces évolutions. Sur ce dernier point, la question du rôle des pouvoirs publics s’agissant des modes de vies, voire des choix individuels, est en effet délicate, même si des exemples d’intervention existent (lutte contre le tabagisme par exemple).

Il n’y a pas de réponse simple ou unique à ces questions, et elles peuvent par ailleurs se poser différemment selon les secteurs.

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Equilibre à privilégier entre recours à la sobriété énergétique et recours aux technologies nouvelles dans la future Stratégie

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Fichier(s) à télécharger

  • Technologies de capture, stockage et valorisation du CO2 et puits de carbone (Annexes de la SNBC2) Document PDF | 455.471 Ko

  • Rapport du GIEC : réchaussement de 1,5°C Document PDF | 2502.533 Ko

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