Les politiques publiques relatives à la lutte contre le changement climatique : le cadrage international et européen

La 21e conférence des Parties (COP21) a abouti en décembre 2015 à l’adoption de l’Accord de Paris, qui implique des engagements de limitation des émissions de gaz à effet de serre (GES) pour les pays développés et en développement. L’Union européenne s’était fixée un objectif de réduction d’émissions de GES de 40 % entre 1990 et 2030 et des politiques climatiques reposant notamment sur un système d’échange de quotas d’émission. Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, la Commission européenne a proposé en septembre 2020 un plan cible en matière de climat plus ambitieux à l’horizon 2030 pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. C’est dans ce cadre international et européen que s’inscrit l’action climatique de la France.

Adoption de l'accord de Paris pour le climat (crédit : Arnaud Bouissou / Terra)

Cadrage international et européen de l'action climatique

Cette page vise à fournir au public des éléments permettant de comprendre le cadrage international et européen dans lequel s'insère l'action climatique de la France.

Comprendre le cadrage international et européen de l'action climatique Française, Julien Viau, Ministère de la transition écologique

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  • Échelle mondiale

    CCNUCC et accord de Paris : fonctionnement

    La Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC)

    Premier traité international visant à éviter les impacts anthropiques dangereux pour le climat, la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) a été adoptée en 1992 à Rio de Janeiro.

    Elle reconnaît trois principes :

    • principe de précaution : l’incertitude scientifique quant aux impacts du changement climatique ne justifie pas de différer l’action ;

    • principe de responsabilité commune mais différenciée : toutes les émissions ont un impact sur le changement climatique, mais les pays les plus industrialisés portent une responsabilité accrue de la concentration actuelle de gaz à effet de serre (GES) ;

    • principe du droit au développement économique : les actions de lutte contre le changement climatique ne doivent pas avoir une incidence néfaste sur les besoins prioritaires des pays en développement qui sont, entre autres, une croissance économique durable et l’éradication de la pauvreté.

    Les pays membres de la CCNUCC se réunissent chaque année pour la Conférence des parties (COP). C’est au cours de ces conférences que sont prises les décisions majeures de la CCNUCC.

    Infographie "La COP, c'est quoi ? ", source : Ministère de la Transition écologique

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    La 26e COP aura lieu du 31 octobre au 12 novembre 2021, à Glasgow, sous la présidence du Royaume-Uni et de l’Italie.

    En savoir plus sur : la COP 26

    L'Accord de Paris

    Le 12 décembre 2015 à la COP21, l’Accord de Paris a été adopté par la CCNUCC. Il est entré en vigueur dès le 4 novembre 2016. Accord ratifié le plus rapidement de l’histoire, il est quasiment universel (195 signatures et 192 ratifications : cinq Etats n’ont pas ratifié l’Accord de Paris : l’Érythrée, l’Iran, l’Irak, la Libye et le Yémen. Le retrait des États-Unis aura été effectif du 4 novembre 2020 au 19 février 2021, suite au dépôt de l’instrument de ré-adhésion de la nouvelle administration auprès du Secrétaire général des Nations unies au 20 janvier 2021, et conformément aux dispositions de l’article 21 paragraphe 3 de l’accord de Paris.).

    Contrairement au Protocole de Kyoto, l’Accord de Paris repose sur une approche ascendante qui se base principalement sur la coopération pour inciter tout type d’acteurs, publics et privés à s’engager et à agir en faveur du climat.

    Les objectifs de l’Accord de Paris se déclinent selon trois piliers principaux :

    • l’atténuation : maintenir l’augmentation de la température mondiale « nettement en dessous » de 2 °C d’ici à 2100 par rapport aux niveaux préindustriels et poursuivre les efforts en vue de limiter cette augmentation à 1,5 °C ;

    • l’adaptation : renforcer les capacités des pays à faire face aux impacts du changement climatique et à s’en remettre ;

    • la finance : rendre les flux financiers compatibles avec les objectifs climatiques et mobiliser 100 milliards de $ annuels de financements climat Nord-Sud d’ici 2020.

    En outre, l’Accord de Paris a introduit un mécanisme formel de révision à la hausse des engagements nationaux, les contributions déterminées au niveau national ou « CDN » (« NDCs en anglais » pour Nationally Determined Contributions, dans le schéma suivant), tous les cinq ans.

    Mécanisme de relèvement de l'ambition des NDCS (source : Chiffres clés du Climat, édition 2021)
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    À travers ses trois objectifs de long terme, l’accord fixe une trajectoire globale, mais accorde de la flexibilité aux parties pour déterminer elles-mêmes leurs engagements climatiques, sous la forme de CDN. Les CDN décrivent les efforts nationaux envisagés en termes d’atténuation et éventuellement d’adaptation, basés sur leurs circonstances nationales. Cette approche, en garantissant la prise en compte des spécificités nationales a permis de rassembler un nombre d’engagements sans précédent de l’ensemble des pays du monde, et ainsi de contribuer à l’obtention d’un consensus final lors de la COP21.

    En savoir plus sur : la trajectoire actuelle

    Autres instances (OACI, OMI, Protocole de Montréal)

    Aviation internationale

    L’aviation civile représente environ 2% des émissions mondiales de CO2. Cependant, l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) a engagé une politique d’ensemble de régulation des émissions de CO2 du secteur de l’aviation civile internationale. Pour ce faire, elle a développé une stratégie qui vise à garantir une croissance neutre en carbone à partir de 2020 (CNG 2020).  Pour atteindre l’objectif CNG2020, l’OACI mise sur un « panier de mesures » qui permet de décliner quatre axes d’action :

    • l’amélioration de la performance environnementale des aéronefs ;
    • des procédures opérationnelles (gestion de la circulation aérienne) conduisant à réduire la consommation de carburant ;
    • le développement des biocarburants durables pour les aéronefs ;
    • la mise en place de mesures économiques fondées sur le marché (CORSIA).

    En matière de certification aéronautique, le Conseil de l’OACI a adopté, en mars 2017, la première norme mondiale relative aux émissions de CO2 des aéronefs, applicable à la conception de nouveaux types d'avions à partir de 2020, ainsi qu’aux types d’avions qui seront déjà en production à partir de 2023.

    Lors de la 39ème assemblée de l’OACI en 2016, a été adopté le dispositif CORSIA (Carbon Offsetting and Reduction Scheme for International Aviation). Cette mesure de marché consiste à atteindre, à compter de 2021, une croissance neutre en carbone de l’aviation internationale en compensant ses émissions de carbone dépassant le seuil atteint en 2019 par l’achat d’unités générées par des projets de réduction ou de séquestration carbone. L’OACI a également adopté la liste des standards et des programmes de compensation qui garantissent une haute qualité environnementale des projets éligibles dans le cadre du CORSIA.

    Le mécanisme prévoit plusieurs phases de mise en œuvre, afin de tenir compte des circonstances particulières et des capacités respectives des différents États dans le monde : une première phase entre 2021 et 2026 sur la base du volontariat, puis une seconde phase à partir de 2027 où le dispositif s’appliquera de façon universelle à l’exception d’un certain nombre d’États exemptés en raison de leur niveau de développement, de leur insularité et/ou de leur faible poids dans le trafic mondial.

    Les 107 États volontaires qui participeront à la première phase du CORSIA (au 1er janvier 2022) représentent d’ores et déjà près de 78 % de l’activité aérienne internationale. Des pays ayant une forte activité aérienne tels que les États-Unis, les Émirats Arabes Unis, la Corée du Sud, Singapour, le Japon et le Canada, se sont portés volontaires, aux côtés de l’Union européenne, pour s’investir dans la première phase de ce mécanisme de compensation. Dès la seconde phase, les États inclus dans le dispositif représenteront plus de 93% de l’activité aérienne.

    Sont incluses dans le dispositif les routes aériennes entre deux États participant au dispositif. Chaque année, les émissions de CO2 sur ces routes, seront mesurées et comparées aux émissions de CO2 sur ces mêmes routes par rapport à celles de l’année 2019. Les obligations de compensation seront distribuées à chaque compagnie en fonction d’une part ses émissions totales, d’autre part, la croissance de ses émissions.

    L’un des prochains défis de l’OACI consistera à assurer un déploiement international des carburants aéronautiques durables, d’une part pour favoriser leur prise en compte dans le CORSIA et, d’autre part, dans la perspective de la mise en place d’un objectif climatique de long terme pour le secteur.  

    Au sein de l’Union européenne, les vols intra-Espace économique européen (EEE)  sont soumis au marché carbone européen.

    En savoir plus sur : le dispositif mondial de maîtrise des émissions de l'aviation

    Transport maritime international

    En raison du caractère éminemment international du transport maritime et de la volatilité du lien (par le pavillon, la localisation ou la propriété) entre les navires et les états, la fixation de CDN maritimes au niveau national ne semblait pas pertinente. C’est pourquoi le protocole de Tokyo a confié à l’Organisation Maritime International (OMI) la responsabilité de fixer des objectifs pour l’ensemble du secteur et de mettre en place les mesures nécessaires au niveau global.

    C’est ce qu’a fait l’OMI le 15 avril 2018, dans le cadre de son 72ème Comité de la protection du milieu marin (MEPC) en adoptant sa « stratégie initiale de réduction des émissions de gaz à effet de serre des navires ».

    Cette stratégie fixe des objectifs qui constituent, en quelque sorte, les CDN du transport maritime mondial, comme si ce dernier était un pays :

    • Un objectif absolu de court terme : plafonner les émissions de GES du transport maritime « dès que possible » ;
    • Un objectif relatif de moyen terme : réduire l’intensité carbone moyenne du transport maritime d’au moins 40% en 2030 et de 70% en 2050 ;
    • Un objectif absolu de long terme : réduire de 50% les émissions de GES du transport maritimes en 2050 en visant leur élimination totale au plus tôt au cours de ce siècle.

    Elle prévoit également l’adoption de mesures de court, moyen et long terme pour atteindre ces objectifs.

    Mesures de court terme

    Dans le cadre du 76ème MEPC, l’OMI a adopté définitivement le 18 juin 2021 les premières mesures concrètes visant à mettre en œuvre sa stratégie de réduction de l’intensité carbone des navires d’ici 2030.

    Ces mesures se décomposent en deux parties :

    • Un volet « technique » : les navires devront mettre en place durant l’année 2023 au plus tard de nouveaux équipements, comme des limiteurs de puissance, afin de réduire immédiatement leur intensité carbone ;
    • Un volet « opérationnel » : une notation individuelle de l’intensité carbone réelle (consommation du navire par rapport à la distance parcourue) sera attribuée aux navires (note de A à E) chaque année sur la base de leurs performances de l’année précédente, en référence à des seuils qui seront abaissés d’année en année. Ces mesures conduiront à réduire la vitesse de certains navires ou encore encourager la propulsion vélique. Une majorité d’Etats membres de l’Organisation, dans la dernière ligne droite des négociations, se sont prononcés en faveur d’une réduction de l’intensité carbone du volet opérationnel limitée à 11% entre 2020 et 2026. Une révision de la mesure en 2025 permettra de fixer de nouvelles valeurs pour les années 2027-2030 après analyse des premières années de mise en œuvre afin d’atteindre l’objectif fixé par la Stratégie initiale de l’OMI de réduire l’intensité carbone de la flotte mondiale de 40% entre 2008 et 2030.

    Mesures de moyen et de long terme

    Lors de ces prochaines sessions de travail programmées en octobre et novembre 2021, l’OMI va commencer à travailler sur l’élaboration de mesures concrètes permettant la conversion de la flotte mondiale à des modes de propulsion décarbonés. Ces mesures pourront être de deux ordres :

    • des mesures normatives imposant au navire l’usage de tel ou tel carburant ou un maximum relatif ou absolu d’émission de GES ;

    • des mesures de tarification du carbone (Taxe ou marché carbone).

    Révision de la stratégie

    A l’instar des CDN des états, les objectifs de l’OMI doivent être révisés. C’est pourquoi l’OMI s’engagera à partir de l’année prochaine (2022) dans la révision de sa stratégie de réduction des GES du transport maritime.

    De nombreux états et ONG plaident pour un rehaussement de l’ambition fixant un objectif de neutralité carbone du transport maritime international pour 2050.

    Au sein de l’Union européenne, l’inclusion du transport maritime dans le marché carbone européen est en cours de discussion

    Protocole de Montréal

    Les substances appauvrissant la couche d’ozone (SAO) sont responsables du trou dans la couche d’ozone qui fut découvert à la fin de l’année 1985. Cette dégradation de l’ozone stratosphérique a pour effet de diminuer la qualité de filtrage des rayons ultraviolets émis par le soleil.

    Mais les substances appauvrissant la couche d’ozone (CFC, les halons, le tétrachlorure de carbone, le trichloroéthane, le bromure de méthyle, les HBFC, les HCFC et le bromochloéthane) sont également pour la plupart de puissants gaz à effet de serre : un dégazage à l’atmosphère de 1 kg de CFC-12 (potentiel de réchauffement planétaire ou PRP = 10 900) a le même impact qu’un parcours de 90 000 km en berline ou que 10 900 kg de CO2.

    De même, les gaz à effet de serre fluorés (PFC, SF6, et HFC) sont responsables du réchauffement climatique. A titre d’exemple, un dégazage à l’atmosphère de 1 kg de HFC-134 aura le même impact sur le climat que 1 300 kg de CO2 ou encore le même impact qu’un parcours de 10 000 km en berline.

    Suite à la découverte du trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique, fin 1985, les gouvernements ont reconnu la nécessité de prendre des mesures plus vigoureuses pour diminuer la production et la consommation d’un certain nombre de CFC, de plusieurs halons et de certains HCFC.

    Le Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone a en conséquence été adopté le 16 septembre 1987 et est entré en vigueur le 1er janvier 1989, après avoir été ratifié par 29 pays (dont la France) et la Communauté économique européenne.

    Le Protocole a été conçu de manière à ce que le calendrier d’élimination des substances appauvrissant la couche d’ozone puisse faire l’objet de révisions, en fonction d’évaluations scientifiques et techniques régulières. C’est à la suite de telles évaluations que le Protocole a été modifié afin d’accélérer le rythme des éliminations. Il a également été amendé afin d’introduire de nouveaux types de réglementations et pour ajouter de nouvelles substances réglementées. Fin 2015, 196 pays (soit tous les Etats reconnus par l’ONU) ainsi que l’Union Européenne avaient ratifié le protocole de Montréal et ses quatre amendements.

    Un amendement au protocole de Montréal a été adopté à Kigali le 18 octobre 2016. Il prévoit l’abandon progressif des fluides HFC sur l’ensemble de la planète.

  • Echelle européenne

    Cadre européen actuel d'action en matière de climat et d'énergie

    Adopté par le Conseil européen d’octobre 2014, puis révisé en 2018, le cadre européen actuel d’action en matière de climat et d’énergie définit les objectifs suivants à horizon 2030 :

    • une réduction d’au moins 40 % des émissions de GES par rapport à 1990 (sans prise en compte des absorptions) ;
    • une déclinaison de cet objectif avec, d’une part, une réduction de -43% des émissions des secteurs soumis au marché carbone européen (UE ETS - Emission Trading System) (production électrique et de chaleur, et industrie) et, d’autre part, une réduction de -30% des émissions des secteurs non soumis à l’ETS (transports, bâtiment, agriculture, déchet, petite industrie) par rapport à 2005;
    • une augmentation à 32 % de la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique finale brute ;
    • une augmentation de 32,5 % de l’efficacité énergétique.

    L’adoption par le Conseil européen de décembre 2019 d’un objectif de neutralité climatique de l’Union européenne à horizon 2050 a engagé la révision de ce cadre énergie-climat européen.

    Nouvelle loi européenne pour le climat

    Le 4 mars 2020, la Commission européenne a publié sa proposition de loi européenne sur le climat, qui constitue un élément important du Pacte vert pour l'Europe. Le 17 septembre 2020, la Commission a publié une proposition modifiant sa proposition initiale afin d'y inclure un objectif révisé de réduction des émissions de l'UE d'au moins 55 % d'ici 2030. Elle a également publié une communication sur le plan cible en matière de climat à l'horizon 2030, accompagnée d'une analyse d'impact détaillée.

    En savoir plus sur : le Pacte vert pour l'Europe

    Dans ses conclusions des 10 et 11 décembre 2020, le Conseil européen a approuvé un objectif contraignant consistant en une réduction nette des émissions de gaz à effet de serre dans l'UE d'au moins 55 % d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990 (incluant les absorptions). L’Union européenne a pu ainsi être en capacité de transmettre en décembre 2020, dans les délais impartis par l’Accord de Paris, sa nouvelle Contribution nationale déterminée (CDN) à la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CNUCCC).

    L’adoption de la Loi européenne pour le climat, entrée en vigueur le 1er juillet 2021, est venue traduire dans le droit européen l’objectif de neutralité climatique en 2050 et l’objectif 2030 de réduction des émissions d'au moins 55 %, tout en limitant la contribution à l’objectif du puits carbone européen à hauteur de 225 MtCO2e.

    Le rehaussement de l’objectif européen aura un effet direct sur l’objectif national de réduction des émissions à 2030. La Loi de programmation sur l’énergie et le Climat (LPEC), qui doit être adoptée d’ici mi 2023, devra fixer les priorités d’action de la politique climatique et énergétique nationale, en tenant compte de ce rehaussement.

    La publication le 14 juillet 2021 par la Commission européenne d’un paquet législatif dit « Fit for 55 » ("Paré pour 55") comprenant un ensemble de propositions de révision ou de nouveaux textes législatifs, assorties d’études d’impact, vise à aligner le cadre énergie-climat de l’Union européenne avec cette nouvelle ambition climatique à l’horizon 2030 et l’atteinte de la neutralité carbone de l’Union européenne au plus tard en 2050. Ces textes sont actuellement en cours de négociations au niveau du Conseil de l’Union européenne (Etats membres) et du Parlement européen.

    Ces dispositions législatives auront une influence majeure sur les politiques nationales et sectorielles pour toute la décennie et au-delà. La traduction de ce paquet sera d’ailleurs un enjeu clef de l’actualisation de nos programmations nationales.

    Mettre en oeuvre le pacte vert pour l'Europe, Union européenne, 2021 (source : Commission Européenne)
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    En savoir plus sur le paquet "Fit for 55"

    Politiques et instruments climatiques européens

    Système européen d'échange de quotas d'émissions (EU ETS Emissions Trading System) 

    Le système européen d’échange de quotas d’émission (SEQE ou EU ETS en anglais) a été créé en 2005 afin d’imposer un plafond d’émissions aux secteurs très émetteurs de l’UE que sont la production d’électricité, l’industrie lourde et l’aviation intra-européenne.

    Emissions issues de la zone de raffinage de Port Jérôme (crédit : Laurent Mignaux / Terra)

    Sous ce plafond, les installations reçoivent ou achètent des quotas d’émission qu’elles peuvent échanger les unes avec les autres. Ces installations doivent restituer chaque année autant de quotas (1 quota = 1 tonne de CO2) que leurs émissions vérifiées de l’année précédente.

    Ce plafond diminue de manière linéaire chaque année de manière à atteindre une réduction de 43 % entre 2005 et 2030.

    Depuis 2013, le périmètre de l’EU ETS s’est étendu par l’inclusion de nouveaux secteurs et types de gaz à effet de serre. Il couvre à présent plus de 11 000 installations industrielles et centrales électriques dans l’UE et les pays de l’Espace économique européen (Norvège, Liechtenstein et Islande) ainsi que les vols à l’intérieur de cette zone, ce qui représente environ 45 % des émissions de GES de cette zone.

    Depuis 2013, de moins en moins de quotas sont alloués gratuitement :

    • les centrales électriques ne reçoivent plus de quotas gratuits depuis 2013, sauf exemption temporaire pour huit pays d’Europe centrale et orientale ;
    • l’industrie manufacturière continue de recevoir une part de ses quotas gratuitement, qui diminue de 80 % en 2013 à 30 % en 2020, sauf les secteurs industriels référencés par la Commission européenne comme étant soumis à un risque de fuite de carbone (c’est-à-dire de délocalisations hors zone UE dans le but d’échapper à une contrainte carbone), qui bénéficient de 100 % de quotas gratuits jusqu’en 2020.

    Les allocations gratuites sont établies par rapport à des référentiels d’intensité carbone établis par secteur ou produit, et à des données d’activité. Les autres quotas sont vendus aux enchères et versés aux budgets des États qui ont l’obligation d’en utiliser au moins la moitié pour le climat et l’énergie.

    Les quotas sont échangeables : une installation qui émet plus que son allocation peut acheter des quotas sur le marché ; une installation qui réduit ses émissions peut revendre ses quotas non utilisés.

    Révision à venir du marché du carbone européen

    Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose de renforcer ce marché carbone européen en visant une réduction de -64% des émissions en 2030 par rapport à 2005 au lieu de -43% actuellement et de -61% sur le périmètre incluant également l’aviation et élargi au transport maritime (cf. infra). Des ajustements sont prévus avec un plafond d'émission revu à la baisse et une accélération de la réduction annuelle de quotas pour atteindre le nouvel objectif en 2030.

    Les secteurs couverts par le futur Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), qui les protègera contre les risques des fuites carbone, auraient une extinction très progressive de leurs quotas gratuits jusqu’à 2035. La Commission introduit des conditionnalités à l’allocation de quotas gratuits. Les Etats ont l’obligation de dédier 100% des recettes des enchères à des actions climatiques. Le Fonds de modernisation (abondement supplémentaire de +2,5% du budget global des quotas) et le Fonds innovation sont renforcés par plusieurs sources (essentiellement quotas libérés des secteurs MACF).

    Par ailleurs, la Commission propose l’extension du marché carbone européen EU ETS au transport maritime intra-européen et couvrant 50% des émissions des trajets de et vers l’Union européenne, ce de manière progressive entre 2023 et 2026, et sans quotas gratuits.

    Pour le secteur de l’aviation, la Commission propose une suppression rapide des quotas gratuits sur 4 ans (entre 2024 et 2027), une application de l’UE ETS aux seuls vols intra-européens et une application du mécanisme international de compensation de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) dit CORSIA aux seuls vols extra-européens. Le projet de directive s’appliquerait à tous les vols mais avec des obligations différenciées.

    Enfin, la Commission propose la création d’un marché carbone européen adjacent portant sur la consommation énergétique des transports terrestres et du bâtiment qui serait effectif en 2026, après une phase d’inventaire entre 2024 et 2025. La réduction d’émissions de ces secteurs à compter de 2024 est proposée à hauteur de -43% en 2030 par rapport à 2005. Ce nouveau marché carbone européen revient à introduire une tarification du carbone pour ces secteurs, harmonisée au niveau européen.

    Afin d’accompagner la transition de ces secteurs, qui restent soumis aux objectifs climatiques des Etats-membres dans le cadre de l’ESR (Effort sharing regulation), un Fonds d’action sociale pour le climat serait créé à partir de 25% des revenus d’enchères de ces quotas afin d’accompagner financièrement les ménages modestes et PME vers des solutions bas carbone.

    Enfin, afin de maintenir la compétitivité des secteurs exposés aux « fuites de carbone », un Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) a été proposé sur des secteurs pilotes et en cohérence avec l'UE ETS renforcé.

    En savoir plus sur le Mécanisme d'ajustement carbone aux frontières

    Règlement du partage de l’effort (ESR – Effort Sharing Regulation)

    Pour les émissions plus diffuses qui sont émises dans les secteurs des transports, des bâtiments, de l’agriculture, des déchets et de l’industrie non couvertes par l’UE ETS, un objectif de réduction d'émissions est déterminé au niveau européen et doit être atteint collectivement par les Etats-membres, qui par subsidiarité sont responsables de la mise en œuvre.

    L'objectif européen est une réduction de -30% des émissions de GES pour les secteurs couverts d’ici 2030 par rapport à 2005. Cet objectif est réparti selon des différences par Etat-membre principalement sur la base des capacités économiques, c’est-à-dire en fonction de la richesse par habitant. Le règlement matérialise ces objectifs par des budgets carbone annuels attribués à chaque Etat-membre.

    Afin de permettre d’optimiser les coûts tout en respectant le budget carbone total de l’UE, le règlement permet certaines flexibilités, notamment l’échange de quotas d’émissions entre les États membres, ou avec l’EU ETS et l’UTCAF (« LULUCF »). Au titre de ce règlement, la France doit actuellement réduire ses émissions non couvertes par le marché carbone de 37 % en 2030, par rapport à 2005.

    Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose une réduction rehaussée à -40% pour 2030 au lieu de -30% actuellement sur le même périmètre sectoriel en conservant la même méthodologie de répartition des objectifs nationaux. Les flexibilités entre Etats membres ou avec les autres secteurs sont conservés. A ce titre, la Commission propose ainsi de relever l'objectif français à -47,5% en 2030 par rapport à  2005.

    Le graphique ci-dessous indique l'objectif proposé en matière de réduction des émissions d'ici à 2030 pour chaque État membre.

    Répartition des efforts entre les Etats membres pour atteindre le nouvel objectif de l'UE (source : Commission Européenne)
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    Règlement sur l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF – dit « LULUCF »)

    Pour atteindre la neutralité carbone, les émissions résiduelles en 2050 doivent être compensées par des puits de carbone, c'est-à-dire les écosystèmes naturels ou procédés artificiels permettant de capter et de stocker une quantité significative de dioxyde de carbone (CO2), de manière à en limiter la concentration dans l'atmosphère. Il s'agit des écosystèmes gérés par l’homme (forêts, terres agricoles...), des produits et matériaux issus de la bioéconomie à partir de matières végétales (bois, paille...), des procédés industriels comme la capture et stockage ou réutilisation du carbone.

    Champs (crédit : Arnaud Bouissou / Terra)

    L'enjeu des puits de carbone naturels est pris en compte dans le cadre européen relatif à l'énergie et au climat au travers du règlement relatif à la prise en compte des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre résultant de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie (UTCATF).

    Ce règlement a été adopté par le Conseil le 14 mai 2018, à la suite du vote du Parlement européen du 17 avril 2018.

    Le règlement impose à chaque État membre de veiller, grâce à des mesures spécifiques dans le secteur, à ce que les émissions de CO2 comptabilisées provenant de l'utilisation des terres soient entièrement compensées par des absorptions équivalentes de CO₂ présent dans l’atmosphère. C’est ce qu’on appelle la « règle du bilan neutre ou positif ».

    Le règlement laisse une certaine marge de manœuvre aux États membres. Ainsi, si un État-membre comptabilise des émissions nettes provenant de l’utilisation des terres et de la foresterie, il peut utiliser des quotas au titre du règlement sur la répartition de l’effort pour se conformer à la règle du bilan neutre ou positif.

    Les États membres ont aussi la possibilité d'acheter ou de vendre des absorptions nettes à d’autres États membres, ce qui peut les encourager à accroître leurs absorptions de CO2 au-delà de leurs propres engagements.

    Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose de réviser ce règlement en visant à l’horizon 2030 un niveau de puits carbone européen de 310 MtCO2e (versus 225 MtCO2e actuellement) avec des objectifs de puits dédié à chaque Etat membre. Pour la France, il serait de -34 MtCO2e. Un secteur dit « AFOLU » (Agriculture, forestry and Other Land Use) serait créé après 2030, incluant les émissions non CO2 de l’agriculture et visant la neutralité au niveau de l’Union en 2035 et des émissions négatives au-delà.

    Exploitation durable de nos ressources naturelles (source : Commission Europénne)
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    Politiques et mesures sectorielles

    Viennent en complément et en soutien de ces outils climatiques des politiques et mesures sectorielles, qui elles aussi voient leurs objectifs et échéances revus à la hausse dans le cadre des propositions de la Commission du paquet « Fit for 55 ».

    Dans le domaine de l’énergie, les directives sur la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables, sur l’efficacité énergétique et sur la taxation de l’énergie.

    Dans le domaine des transports, les réglementations relatives aux standards d’émissions CO2 des véhicules légers, aux carburants alternatifs dans le transport maritime et dans l’aviation ainsi qu’aux infrastructures de recharge. Ce corpus législatif et réglementaire vise à accélérer la décarbonation de l’économie européenne à travers tous les secteurs afin de permettre l’atteinte par les Etats-membres de leurs objectifs climatiques.

    La directive relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables (EnR) fixe un objectif collectif contraignant d’au moins 32% d’EnR dans la consommation finale brute d’énergie de l’UE d’ici 2030. Contrairement à la période 2013-2020, il n’y a plus d’objectifs nationaux contraignants formels mais à partir du 1er janvier 2021, la part des EnR dans la consommation finale brute d’énergie ne doit pas être inférieure à des « niveaux de référence » nationaux (soit 23% pour la France). Les Etats-membres doivent toutefois fixer eux-mêmes des « contributions nationales » afin de respecter collectivement l’objectif global de 32% de l’UE.

    Par ailleurs, le texte fixe des sous-objectifs pour le secteur des transports. Dans chaque Etat-membre :

    • au moins 14% de la consommation d’énergie finale doit provenir de sources renouvelables dans tous les modes de transport en 2030 (contre 10% pour 2020) ;
    • une trajectoire de biocarburants « avancés », (produits à partir de matières premières qui ne sont pas en concurrence alimentaire comme la biomasse issues de déchets, d’huiles de cuisson, d’algues, etc.), de 0,2% en 2022, 1% en 2025 pour atteindre au moins 3,5% d’ici 2030.

    Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose un objectif de 40% d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie en 2030, renforce l’objectif contraignant d’augmentation annuelle de la part d’énergies renouvelables (ENR) dans le secteur du chauffage et du refroidissement, et un objectif indicatif pour le secteur de l’industrie. Il fixe un nouvel d’objectif pour les énergies renouvelables dans le secteur des transports, exprimé en réduction des émissions de GES (-13%), en remplacement de l’ancien objectif exprimé en part énergétique incorporée. Il renforce enfin les exigences de durabilité, en particulier sur la biomasse forestière.

    Les énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de l'UE (source : Commission Européenne)
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    La directive sur l’efficacité énergétique fixe l’objectif d’amélioration de l'efficacité énergétique de l'UE d'au moins 32,5 % d'ici 2030. Elle instaure également une obligation de réaliser, entre 2021 et 2030, des économies d'énergie annuelles de 0,8 % de la consommation d'énergie finale, en accordant aux États membres de la souplesse dans la manière de respecter cette obligation. Le texte demande également aux États membres de réduire la précarité énergétique lorsqu'ils élaborent des mesures de politique publique visant à réaliser des économies d'énergie. Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose de rehausser l’objectif d’efficacité énergétique de l’UE pour 2030 à 787 Mtep en énergie finale et 1023 Mtep en énergie primaire, ce qui représente respectivement des niveaux d'ambition de 36% et 39% par rapport au scénario de référence (mis à jour en 2020).  L’obligation d’économie d’énergie annuelle qui s’applique de façon contraignante à chaque Etat-membre est relevée à 1,5% par an de la consommation énergétique finale à partir de 2024, ce qui correspond à une augmentation d’environ 45% en volume par rapport à l’objectif actuel.

    Réhausse de l'objectif d'efficacité énergétique de l'UE (source : Commission Européenne)
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    Depuis le 1er janvier 2020, la réglementation fixant des normes de performance en matière de limitation des émissions de CO2 pour les voitures et véhicules utilitaires légers neufs est entrée en application. Les constructeurs doivent respecter des objectifs établis pour réduire les émissions moyennes à l’échelle du parc de véhicules immatriculés au cours d’une année civile donnée. D’ici à 2025, les constructeurs devront réduire leurs émissions de 15 % par rapport aux niveaux de 2021. D’ici à 2030, ils devront parvenir à une réduction de 37,5 % pour les voitures et à une réduction de 31 % pour les utilitaires légers. Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose de renforcer les objectifs de réduction des émissions moyennes de CO2 à l’échelle du parc de l’Union en 2030, avec -55% pour les voitures et -50% pour les véhicules utilitaires légers. Elle introduit également un objectif de fin de vente des voitures et véhicules utilitaires légers thermiques neufs (émettant des GES à l’échappement) en 2035.

    Des transport routiers plus propres (source : Commission Européenne)
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    Dans le domaine du transport aérien, la Commission européenne a proposé le Règlement « Refuel Europe – Aviation » dont l’objectif consiste à augmenter la production et l’utilisation de carburants aériens durables. Il s’appliquera aux fournisseurs de carburants, aux aéroports et aux compagnies aériennes. Les fournisseurs de carburants devront fournir des carburants aéronautiques durables et synthétiques selon des objectifs croissants (à savoir : 2% de carburants durables en 2025 et 5% en 2030, de 20% en 2035 et 63% en 2050).

    Nouveaux objectifs en matière de carburants d'aviation durables (source : Commission Européenne)
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    La Commission européenne a également proposé de réviser la directive sur la taxation de l’énergie pour établir une taxation progressive du kérosène qui, en 10 ans, devrait atteindre 0,378 €/litre, correspondant à un alignement sur la fiscalité du transport routier.  

    Dans le cadre du paquet « Fit for 55 », la Commission propose une révision de la directive sur le déploiement d’infrastructure pour les carburants alternatifs en proposant le déploiement d’une infrastructure minimale au niveau européen pour soutenir le développement des véhicules utilisant des carburants alternatifs, et garantir l’interopérabilité des différents systèmes entre les États membres. Cette révision renforce les précédentes dispositions qui prévoyait l’adoption par chaque Etat membre d’un plan d’action national avec des objectifs chiffrés de déploiement d'infrastructures. En application de la directive actuellement en vigueur, les autorités françaises avaient indiqué qu'entre 21 000 et 35 000 points de recharge ouverts au public seraient installés fin 2020. C'était un objectif assez peu ambitieux et diverses annonces ont porté cet objectif à 100 000 point de recharge fin 2021. Environ 45 000 points de recharge sont ouverts en France aujourd'hui. Actant l’inefficacité du cadre actuel, le règlement abandonne la démarche d’engagement volontaire des Etats-membres et précise des objectifs chiffrés que ces derniers devront respecter. Le règlement proposé par la Commission imposerait ainsi aux Etats membres d'installer 1 kW de capacité totale de recharge sur leur territoire pour chaque véhicule électrique immatriculé (et 0,66 kW pour chaque VHR). En suivant les projections sur le parc de véhicules légers électriques et en prenant une moyenne de 20 kW par point de charge, on obtient un objectif à 113 000 fin 2025.

Fichier(s) à télécharger

  • Texte de l'Accord de Paris.pdf Document PDF | 5318.25 Ko

  • Comprendre les règles de l'Accord de Paris.pdf Document PDF | 645.447 Ko

  • Communication de la Commission Européenne sur le Paquet fit for 55.pdf Document PDF | 540.178 Ko

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